mercredi 16 septembre 2009

René RICOL, médiateur du crédit

"Les entreprises doivent recommencer à avoir des projets"


J’ai répondu bien volontiers à l’appel du Réseau Entreprendre. Je connais bien les réseaux d’accompagnement à la création d’entreprise pour avoir dirigé l’Agence pour la création d’entreprise (APCE), à l’époque quasiment en cessation de paiement (ce qui faisait mauvais effet pour des spécialistes de la création d’entreprise…). J’ai obtenu que cessent les luttes entre réseaux d’accompagnement, et ce décloisonnement a généré dès la première année 70 000 créations d’entreprises supplémentaires.

Je voudrais commencer par tordre une idée reçue : l’idée selon laquelle les banques ne financent plus est aujourd’hui inexacte dans les faits. De mai à juillet 2009, les crédits accordés aux entreprises sont globalement en baisse. Mais dans le détail, on s’aperçoit que la baisse est très sensible pour les sociétés financières (banques, assurances…) alors que le crédit aux entreprises non financières – celles qui nous intéressent vraiment - a augmenté de 2,6%. Sachant que les grandes entreprises ont largement fait appel au marché à l’époque, on peut en déduire que les prêts aux PME ont augmenté à un rythme plus élevé encore.

L’Etat et les banques prennent plus de risques. Désormais, les entreprises doivent recommencer à avoir des projets. Dans le cas contraire, nous ne pourrons pas sortir de la crise. Nous ne savons pas si nous ne sommes que dans une reprise technique ou dans une reprise durable. Mais dans tous les cas, le chef d’entreprise doit être ambitieux dans cette période : tenter de tenir modestement jusqu’à la sortie de crise n’est pas la bonne méthode. Ailleurs en Europe, nos compétiteurs restructurent et se préparent à sortir plus forts de la crise. Les entreprises françaises refusent pour l’instant la restructuration.

Entrepreneurs, prenez du recul et ayez une vision stratégique pour identifier le marché dans lequel vous vous placez. Les TPE actives sur un marché local ne doivent pas nécessairement courir vers les volumes mais innover, les PME plus importantes doivent élargir leurs marchés, etc.

Par ailleurs, les grands donneurs d’ordre doivent également entrer dans la chaîne de solidarité intelligente que nous avons créée. N’est-il pas possible d’obtenir les mêmes résultats en cessant de sacrifier les PME ? Si l’on découvre qu’un grand groupe prend 2, 3 ou 4% d’escompte en contrepartie d’un paiement à 30 jours de ses fournisseurs (obligation désormais légale), si l’on découvre que les grands groupes inscrivent des retenues sur facture de 15%, si l’on découvre qu’ils exigent des TPE et PME de sous-traiter à l’étranger (simplement parce que c’est le modèle dominant), le grand public le supportera très mal.

La médiation met donc en garde les grands groupes sur la manière d’utiliser l’argent prêté pendant cette période de crise. Le citoyen français, dans un élan de solidarité, supporte le plan de relance ; mais il sera bientôt temps de lui dire à quoi a servi cet argent. Les PME et les TPE ne seront pas non plus exemptes de ce regard porté par les citoyens : ont-elles procédé aux restructurations nécessaires ?

Certaines entreprises hésitent encore à faire appel à la médiation pour plusieurs raisons : la peur que le banquier le vive mal, et la peur du jugement du médiateur. D’abord, les banquiers ne subissent plus la médiation, ils se situent dans une démarche volontaire. Ensuite, sachez que le médiateur ne vous jugera, même si évidemment il doit mettre à plat le dossier pour le comprendre. La baisse des carnets de commandes, la compétition rude, les assureurs crédits qui ont tardé à changer d’attitude… La situation est bien connue, et la médiation n’est pas là pour juger, mais seulement pour trouver des solutions.

Maintenir le rythme de la création et de la reprise est essentiel et ce qui est capital, c’est qu’il n’a pas baissé. La médiation n’aime pas la reprise par les fonds majoritaires (vision uniquement financière). Nous avons donc créé un statut de tiers de confiance dans lequel l’ensemble des réseaux d’accompagnement est impliqué. Le tiers de confiance, spécialiste de la création et de la reprise, nous livre son analyse sur le projet et sur management qui souhaite reprendre une société.

En conclusion, nous entrons dans une période dans laquelle nous devrons être ambitieux. La médiation peut vous aider, travaille avec les fonds régionaux pour une meilleure vision de proximité, et pourra amener les banquiers autour de la table.


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